« L’eau nomade »
Résidence au camping Le Plantaurel et exposition collective en partenariat avec les Abattoirs, Musée-FRAC Occitanie, Toulouse. Artiste invitée Sarah Ho.
L’art est éminemment plastique et perméable et est capable de se développer dans n’importe quel contexte. Les pratiques élargies des artistes actuels permettent une lecture, une interprétation sans fin du monde contemporain et un éclairage poétique ou critique.
La Maison Garonne, a semblé être un lieu culturel évident, par sa capacité d’accueil et son emplacement, pour augmenter la résidence d’une exposition thématique et toucher un plus large public, autour à la fois de l’idée de l’habitat temporaire qu’est le camping et de l’eau, puisque le camping et la Maison Garonne se trouvent sur ses berges. Le titre de l’exposition « L’eau nomade » résume à lui seul l’univers développé à la fois par l’artiste en résidence au camping et le sens des œuvres qui sont réunies pour l’exposition.
Le pont déconstruit et remonté en équilibre de Caroline Pandelé, berges réunies verticalement qui remettent en jeu la fragilité du passage d’un temps à un autre, d’un lieu à un autre, d’une vie à une autre. Son injonction « ne laisse pas la pluie tomber » gravée avec détermination, comme sur les murs de sa prison intérieure, un appel à sauvegarder son libre arbitre, sa liberté de penser, même dans les conditions les plus difficiles. Les cerfs-volants en forme d’animaux marins de Jason Glasser renvoient à l’imaginaire porté par les éléments, le vent et l’eau, domaines des flux changeants et des circulations incontrôlées, territoires de la liberté. Les gravures et objets de Sarah Hô, puisent leur vocabulaire dans le nomadisme et l’étirement du temps dans l’espace. Fil d’Ariane nouant les lieux, les objets, les matières comme les mots d’une langue, la broderie comme la gravure, le sillon de la pointe, le fil, sont un au-delà du dessin. Le radeau comme scène pour un chant au lever du soleil, projette à la fois la douceur et le danger de l’eau. Sa puissance et l’impossibilité de la saisir vraiment. Julie Chaffort propose ici une spectaculaire intimité. Eric Hurtado photographie ici une eau éternelle. Celle d’une grotte, celle d’un temps hors du notre. Une eau du fantasme parce qu’une une eau miroir.
Un camping au bord de l’eau, une Maison Garonne en surplomb, sont tous les deux en prise avec l’élément liquide qui nous traverse tous et nous nourrit. Nous vivons sous cette influence enfouie au fond de nous de l’eau qui court, qui s’évapore et se recompose sans cesse. L’eau matrice, l’eau qui nous fait naître, l’eau qui nous noie à la fin dans la douloureuse sécheresse du vieillissement. Eau sans cesse renouvelée qui n’est, dans chacun de ses états, ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre.
Caroline Pandelé a travaillé dans l’échange et dans une proximité féconde avec les résidents, locataires, habitants du camping Le Plantaurel. Son travail est restitué à la fois ici : ce sont les objets prêtés ou donnés par les habitants du camping pour parler sans mots mais avec un objet et au camping ou les mots disent en une expression, un titre, l’histoire, le lien affectif, de l’habitant avec, son mobil-home, son camping-car, sa tente, son emplacement.
Entre Caroline Pandelé et les habitants du camping, il y aura eu un temps, maintenant évaporé, dont il restera les contours flous de la possibilité d’un rêve et quelques mots affectueux dorés sur une planche de bois rouge.
Merci à la Maison Garonne pour l’accueil de cette exposition.